Les propositions en matière d'éducation, qui sont le résultat de discussions tenues au deuxième Atelier International sur le savoir autochtone en Amérique latine, abondent dans le sens du travail de l'UNESCO sur les enjeux interculturels. Les points soulevés s'inscrivent dans une approche exhaustive et sensible aux droits humains et sont liés aux objectifs généraux de l'Agenda 2030 pour le développement durable. Les recommandations visent à orienter les actions pour l'éducation et les enjeux interculturels d'ici 2030.
Les propositions élaborées par des experts sur l'éducation de points de vue autochtones, en collaboration avec des dirigeants et représentants ministériels du Mexique, Guatemala, Équateur, Pérou, Bolivie, Chili, Paraguay, Panama et Argentine, ont été présentées au regroupement des Ministres de l'éducation d'Amérique latine et des Caraïbes le 26 juillet au cours de la seconde Rencontre régionale ministérielle à Cochabamba, en Bolivie.
Les recommandations concernent le respect et la reconnaissance du savoir autochtone en éducation, la prise en compte prioritaire et essentielle du savoir autochtone lorsqu'il est question d'interculturalité dans l'élaboration de politiques gouvernementales touchant à l’éducation et ce, pour tous les niveaux scolaires; les progrès en matière d'équité de genre et l'inclusion du savoir autochtone sur le sujet, ainsi que le renforcement de l'engagement des États à mettre en œuvre des politiques qui revitalisent et promeuvent l’usage des langues autochtones.
Éléments centraux des propositions
Les recommandations résultent des discussions tenues au deuxième Atelier International sur le savoir autochtone en Amérique latine, le 24 juillet 2018, à Cochabamba. Lors de son discours d'ouverture, Roberto Aguilar, le ministre de l'Éducation et de l'État plurinational de Bolivie et hôte de la rencontre, a insisté sur l'importance de ces enjeux dans la région: «En tant que pays d'Amérique latine et des Caraïbes, un de nos objectifs fondamentaux est de consacrer une valeur renouvelée, de rétablir, renforcer et projeter dans le temps tout ce que représentent les peuples autochtones dans le cadre de notre propre existence en tant qu'individus et États et qui fait partie intégrante des droits des peuples et des nations autochtones.»
La présentation des conclusions de l'atelier aux ministres fait état des points suivants:
Respecter et reconnaître l'apport du savoir autochtone en éducation : rétablir et reconnaître l'apport complémentaire du savoir autochtone aux sociétés multiculturelles et interculturelles; intégrer et étendre le savoir autochtone à divers domaines; promouvoir les protocoles de recherche, la documentation et l'approfondissement du savoir autochtone à travers les méthodologies et pratiques propres aux peuples et à leurs caractéristiques idiomatiques.
Intégrer le savoir autochtone comme condition préalable au règlement d'enjeux interculturels et à l’élaboration de politiques à tous les niveaux d'éducation : Assurer l'engagement et la participation à titre de protagoniste des peuples autochtones dans l'élaboration et dans la mise en application de politiques d'éducation inter-, intra- et multilingue; progresser dans le milieu de la formation des enseignants et reconnaître leur rôle central; s'assurer de la pertinence du processus de formation avec la participation des parents dans les milieux éducatifs inter-, intra- et multilingues; garantir un emploi et un salaire convenable et promouvoir le développement de programmes scolaires régionaux autonomes et conformes aux caractéristiques socio-culturelles des peuples autochtones.
Favoriser le progrès relatif à l’équité de genre et l’intégration du savoir autochtone : Promouvoir le débat et la recherche, en accord avec les visions du monde des peuples autochtones et des femmes, sur les enjeux d’inégalité de genre, de sexualité et de diversité sexuelle; garantir la reconnaissance et l’authentification du statut d’auteur et le respect du droit de la propriété intellectuelle via des mécanismes institutionnels pour protéger la sagesse et le savoir acquis et étudiés par les femmes autochtones; assurer l’accès à une éducation de qualité à tous les niveaux scolaires et promouvoir la participation de femmes autochtones dans des rôles de prise de décisions politiques et de leadership; puis, promouvoir l’emploi de procédures pour lutter contre toute forme de discrimination ou de violence contre des femmes et des filles autochtones.
Renforcer l’engagement des États à l’égard des politiques de revitalisation et de promotion des langues autochtones : Créer et renforcer des institutions dédiées à la recherche et la promotion des langues autochtones; implanter des politiques linguistiques dans les communautés qui permettront de mesurer les progrès en enseignement des langues autochtones et en formation du corps professoral; promouvoir le droit d’usage des langues autochtones lors de tout recours à des services et à des institutions publiques ou privées; favoriser les progrès légaux en créant des politiques de diffusion et d’étude des langues autochtones et du multilinguisme dans les médias et sur les réseaux sociaux (TIC); promouvoir le financement et la création de matériel didactique et de livres en langues autochtones; développer, en partenariat avec des organisations autochtones d’Amérique latine, un cadre de référence commun pour l’enseignement des langues autochtones; considérer les spécificités locales et promouvoir la création d’un réseau régional de savoir autochtone qui sera à l’avant-garde des actions menées pour l’Année Internationale des langues autochtones en 2019.
Le document insiste sur le fait que l’Agenda 2030 en matière d’éducation est aussi un appel à valoriser la diversité et le multilinguisme propres aux peuples et aux territoires de la région. Son implantation nécessite une volonté politique de la part des États pour s’assurer du développement complet des savoirs et des langues autochtones dans les procédés éducatifs, assurant ainsi une éducation de qualité permanente et accessible à tous et toutes. À cet égard, Atilio Pizarro, chef de la section Planification, Gestion, Observation et Évaluation du Bureau régional d’éducation pour l’Amérique latine et la région des Caraïbes (OREALC/UNESCO Santiago) a mentionné que ces recommandations impliqueront «la coordination d’actions actuellement en développement. Ce que l’UNESCO offre, c’est d’aider à les coordonner, de contribuer en efforts et en ressources et de fournir une assistance pour favoriser la reconnaissance et l’intégration de cet enjeu dans les politiques éducatives de la région, conformément aux défis présentés par l’Agenda mondial Éducation 2030.»
Plus d’information :
Télécharger les recommandations présentées aux ministres (pdf)
Deuxième Atelier International sur le savoir autochtone en Amérique latine
Deuxième Rencontre régionale des Ministres de l’Éducation d’Amérique latine et des Caraïbes
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Dans son plan d’action pour 2018-2019, le Réseau du savoir autochtone (IndigenousKnowledge Network), coordonné par le Bureau régional d’éducation pour l’Amérique latine et la région des Caraïbes (OREALC/UNESCO Santiago), continuera, entre autres, à organiser des rencontres sur les enjeux interculturels et à fournir des recommandations lors de l’élaboration des rapports régionaux et nationaux.
Dans le même ordre d’idées, on vient de confirmer que le troisième Atelier international sur le savoir autochtone en Amérique latine aura lieu à Santiago, au Chili, en janvier 2019.
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