Dans cet article, l’auteure s’interroge, du point de vue de la théorie politique, sur la possibilité de penser une éducation à la citoyenneté européenne. En 2009, le Comité économique et social européen a suggéré à l’Union européenne (UE) l’introduction d’une « instruction civique européenne commune » afin de « donner à ses citoyens un réel sentiment d’appartenance » à l’Europe. Si des programmes d’éducation civique existent au niveau national, leur transposition, de manière analogue, au cadre européen et à la citoyenneté européenne ne va pas de soi. En effet, et sans compter les raisons politico-pratiques, l’UE ne souscrit pas à la même logique de construction que jadis les États-nations. Il semble à la fois contre-productif et indésirable, quant au processus d’intégration européenne, d’attribuer à l’éducation le rôle qu’elle a pu avoir dans la construction étatique. De plus, l’UE présente quelques traits spécifiques qui posent des défis particuliers à l’application de l’éducation civique à la citoyenneté européenne ; en effet, ce type d’enseignement a traditionnellement été pensé à partir de présupposés stato-nationaux (catégories, questionnements et problèmes). En s’appuyant sur les travaux post- et transnationaux en études européennes et différents écrits sur le rôle des écoles dans la construction des États-nations et sur l’éducation civique en tant que problème éthique et politique, l’auteure entame ici une analyse de ces défis et offre quelques pistes pour repenser l’éducation civique dans le cadre européen.